Toujours Mikes, je suis le sous-marin qui r’garde en avant
On met à l’épreuve le pire jeu de mots de resto depuis Pains d’exclamation.
Quand vous prend l’envie d’engouffrer un sous-marin, vous, comme nous et comme tout le monde au Québec, dites assurément que vous allez «chez Mikes». Sauf peut-être deux ou trois Français en Canada Goose en juin qui disent qu’ils vont «sur Mikes», mais ça, on y peut rien. Or, vous, comme nous pis tout le monde autour, avez tort. Le resto ne s’appelle pas Mikes. Il ne s’appelle pas non plus «Trattoria di Mikes» ou «ah ben, je pensais qu’on était chez Pacini». Que nenni. Depuis 2016, ça s’appelle «Toujours Mikes».
Fondée en 1967 par les frères Marano (Mike Marano et Mike Marano, c’est pour ça, le s à la fin de Mikes), la chaîne a d’abord été spécialisée dans les sous-marins (le sandwich, pas le mode de transport), mais s’est depuis diversifiée en ajoutant au menu des mets italiens sur lesquels ta grand-mère italienne va jeter un regard de mépris et de la pizza (encore une fois, le plat, pas le moyen de transport).
Mais après moult explorations qui l’ont menée aux quatre coins de Saint-Léonard, Toujours Mikes semble sentir le besoin de reconnecter avec ses racines sous-marinières.
Parce que le sous-marin, c’est le sandwich des gens qui rêvent de pouvoir utiliser des ustensiles pour tout. Un sandwich fait pour pas fermer égal, et que de toute façon le pain tiendrait pas parce qu’il est imbibé de sauces et d’huiles, qui te force à utiliser couteau et fourchette comme si tu étais une Kardashian qui n’a jamais vu un repas normal de sa vie et s’exclame «Comment vous appelez ça? Un son de witch?». On comprend pourquoi Perpétuellement Mikes tient à ce plat de choix, qui te fait te sentir fancy avec ce qui est, au fond, un trio Subway toasté.
Dans le but de parler aux jeunes et de renouveler sa clientèle (des vieux qui tètent un réchaud de café entre huit heures et quart pis seize heures douze parce que leur rente de retraite couvre à peine leurs besoins de base pis un demi-sous-sol à Laval-des-Rapides, c’est pas ben ben payant), Éternellement Mikes s’est dotée cet automne d’un plan de match en béton : allier un concours culinaire avec un titre incluant le mot «ultime» ainsi qu’un jeu de mots discutable à d’enlevantes capsules YouTube cumulant des dizaines de milliers de vues. Parce que les jeunes, sont su’ YouTube, tsé! Et qui peut résister à une bataille de sandwichs dans la bouette?
C’est ainsi qu’est né le concours ultime de sous-marins Gourmiam.
(pause, pour vous laisser digérer le jeu de mots)
Ça va, vous vous êtes remis·es de vos émotions?
Faque le concours c’est de voter pour le sous-marin le plus gourmiam…
(autre petite pause, parce que simonac…)
… et ce sous-marin gagnera sa place sur le menu d’Ad Vitam Æternam Mikes. Il pourra être dégusté par les ultimes survivant·es de la race humaine, alors qu’iels regarderont le Soleil se transformer en trou noir.
Mais ce n’est pas tout! En votant, on court la chance (?) de remporter pour 5765,35$ de sous-marins, soit un sous-marin par jour pendant 365 jours, à utiliser entre le 1er janvier 2024 et le 31 janvier 2025, si tu ne t’es pas défenestré·e après 6 mois à manger juste des asties de sous-marins de chez Inéluctablement Mikes.
Pour éviter de créer une commotion dans les Immanquablement Mikes à travers la province digne de la Beatlemania, pis des émeutes rappelant celle du stade à Guns, une première round éliminatoire de recettes sous-marines a été faite à notre insu. Déjà, qu’on ne nous ait pas invité·es comme juges spécialistes de la submarine nous laisse un petit goût amer de persil chéché dans la bouche, mais passons.
On a fait une demande d’accès à l’information auprès du gouvernement du Québec pour connaître les sous-marins des franchisés Fatalement Mikes qui n’ont pas fait la cut, mais paraît que c’est top secret. On ne saura donc pas quelles recettes encore plus weird que l’Eurosub ou celles avec un jeu de mots encore plus grinçant que Le Soucré ne verront jamais le jour ni l’intérieur de notre bouche.
Au terme de délibérations que l’on présume aussi enlevantes et dramatiques de celles dans 12 hommes en colère, le jury déterminé par Invariablement Mikes a choisi trois finalistes, et on copie-colle le communiqué de presse :
Le Poulet Yassine de Chicoutimi : lanières de poulet marinées au thym, persil, moutarde, ail et huile d’olive, tomates, laitue et huile aux herbes.
L’Eurosub de Baie-Comeau : saucisse italienne, bâtonnets de fromage, choucroute au vin, moutarde épicée, roquette, oignons frits et huile aux herbes.
Le Soucré de Saint-Nicolas : brownie, crème glacée, crème fouettée, sucre en poudre et coulis au choix, servi sur un pain à sous-marin frit enrobé d’assaisonnements à pain doré, sucre et cannelle.
Comme il est devenu ardu d’enligner 2500 mots de jokes sur une overdose de sucre à notre âge et que, de toute façon, Le Soucré avait l’air quand même bon (du pain! frit! sucré! avec de la crèmaglace!), on a convenu, dans votre seul intérêt, cher lectorat, de nous taper les deux choix salés. On a tiré à la courte pain (ça c’est comme la courte paille, mais avec des pains à sous-marin qu’il y en a un coupé plus court) et Mathieu a eu l’honneur de sortir sa date en Europe, pendant que Caro se faisait livrer un poulet chicoutimien comme une astie de paresseuse.
Un p’tit tour dans les Europes
Aaaaaahhhhhhh, les vieux pays. La tour Eiffel. Les canaux de Venise. La Méditerranée. Ça fait rêver. Surtout quand tu viens de Baie-Comeau, où ton lot c’est c’est plus un tour de quatre roues, le traitement de canal de Denise et médire de René.
As-tu entendu ça? Paraît que René a encore des problèmes de flatulences.
—Les mémères de Baie-Comeau
Heureusement, même sur la lointaine Côte-Nord, il y a des gens, comme Émily Paquette, capables de nous faire voyager des papilles. Dans sa vidéo, la cheffe explique son processus créatif : «Je conçois des recettes sans jamais y goûter. C’est une création mentale.»
C’est donc dans son mind palace gustatif que la Sherlock du 7 pouces a assemblé les éléments de son Grand Oeuvre : L’Eurosub. Une chouchisse un peu chèche, de la choucroute, de la moutarde, des oignons frits… oui, mais… il manquait encore quelque chose, surtout que la saucisse est pas assez longue pour faire toute la longueur du pain…
Son esprit est allé fouiller dans les recoins de son frigo psychique, et a retrouvé un restant de takeout de la veille, quand son subconscient est allé prendre une brosse. Deux bâtonnets de mozzarella panés et frits complètent donc le portrait. On arrose finalement le tout d’une «huile aux herbes», façon fancée de dire «de la vinaigrette Kraft, celle qui est toujours étrangement sucrée».
Et voilà. Buono apétito, comme on dit à Baie-Como.
On essaie d’aller chercher toutes les sens des papilles pour stimuler l’intérieur de la bouche.
— Émily Paquette, grande timonière du sous-marin
Si elle avait pris le temps de goûter en plus de créer, Émily aurait pu être assez contente du résultat.
C’est pas mauvais du tout. Si le cuistot de notre succursale n’avait pas comme instructions de cuire la saucisse jusqu’à ce que toute trace d’humidité s’en soit échappée, parce qu’on ne niaise pas avec ça, la salmonelle, ce serait sans doute encore mieux.
C’est bon, donc. Mais est-ce que c’est gourmiam? Non. Y’a rien qui est gourmiam, Sempiternellement Mikes. Ça. Existe. Pas. Gourmiam.
Prendre du thym pour soi
Ne cherchez pas de jeu de mots dans le nom du Poulet Yassine de Chicoutimi. (Ben, vous pouvez toujours essayer, mais vous allez pas en trouver, c’est ça qu’on veut dire. On vous empêchera pas de le faire, si mettons vous avez du temps à perdre, si c’est la seule chose qui vous donne envie de vivre aujourd’hui ou si vous avez besoin de stimulation intellectuelle pour plier votre brassée de lavage au lieu de juste contempler le vide en dissociant.)
«Le sous-marin s’appelle le Poulet Yassine parce que c’est Yassine qui a créé la recette», nous dit la vidéo de présentation, qui n’est pas narrée par Yassine. Parce que Yassine, un cuisinier du Sans Arrêt Mikes de Chicout, y’a juste pas le temps de niaiser. Yassine, y s’bâdre pas avec vos niaiseries de jeux de mots finfinauds pis de tournage fancy pour gagner un concours de sous-marins. Yassine, y’a des orders de pizzas à croûte farcie pis des sandwichs western à sortir pour la table 4, pis y’é understaffed à cause que son plongeur l’a ghosté pis que sa sous-chef a pas de garderie cette semaine en raison d’une éclosion de gale dans le groupe des Toucans, faque Yassine, y’a inventé un Poulet Yassine pis y’a appelé ça un Poulet Yassine pis demandez-y pu rien, y’a faite sa job pis tassez-vous de d’là avec vos questions niaiseuses, faut sortir les cassolettes paysannes pour la table 15 avant que la hollandaise pogne en pain pis que le békeune ramollisse. Yassine, y’a pas croustillé tout c’te beau békeune là pour ardjien.
Pas regardant à la dépense, Yassine donne dans le doublé herbacé : sa recette comprend des lanières de poulet mariné dans des herbes dont du thym, qui sont recouvertes de laitue et de tomate, elles-mêmes arrosées d’huile aux herbes dont du thym. Aimez-vous ça, le thym, vous? Parce que Yassine de Chicout aime ça. Et [insert name du cuisinier en poste hier soir here] de Charlesbourg aussi aime ça. Ce sous-marin-là goûte beaucoup le thym. C’est si thym-é que c’est un vrai… thymtamarre.
[bruits de foule en délire]
—Foule en délire
Vous en vouliez un, jeu de mots pour le Poulet Yassine? En v’là un. Astheure, étchoeurez pu Yassine a’ec ça.
Ce poulet, donc, thym sur un moyen temps. Et juste en dessous de ce party thymobuccal se trouve le coup de poing moutardé, asséné par les fameuses lanières de poulet si bien marinées qu’elles n’offrent aucune résistance sous la dent, pas même un p’tit crunch de poulet grillé pour contraster avec le mou de la laitue râpée et le mou du pain mou. C’est le sous-marin idéal pour quand tu as à la fois mal à une dent alors mastiquer trop de dur est douloureux, et des restants de COVID qui font que rien goûte assez prononcé sauf si tu mets beaucoup de thym pis de moutarde.
C’pas un mauvais sous-marin. Tsé, c’pas un sous-marin de dépanneur au pain tout détrempé garni de fromage râpé desséché dont la date d’expiration a été trafiquée.
C’est plutôt un sous-marin qui nous dit que Yassine, ou [insert name du cuisinier en poste hier soir here] de Charlesbourg, aurait peut-être eu besoin de deux journées de congé collées au lieu d’un shift de plus pour inventer une recette sul’ fly.
On ne voit pas ce qu’il y a d’ultime là-dedans, et encore moins de gourmiam, et on continue de se demander ce que les juges qui ne nous incluaient pas ont pu goûter avant et après ça pour y donner une aussi haute note. Oubedon c’est le premier qu’iels ont mangé pis après, toutte goûtait yienque le thym faque ça a faussé les scores? On l’saura jamais.
On va donc méditer sur le sens de la vie, pis le sens du thyming, en écoutant L’ultime liste musicale GOURMIAM de Systématiquement Mikes, un goûteux mélange d’AC/DC, de Europe (sûrement en l’honneur de L’Eurosub), de Marky Mark and the Funky Bunch et de Shakira (ses hanches mentent pô), qui complète à merveille l’expérience 360 de roter un sous-marin gourmiam toute la soirée.
Vas-tu finir ton gourmiam?
C’est quand même beaucoup de pain, hein, un sous-marin? Mangé sur le sens du monde, comme un sandwich, ça paraît pas. Mais découpé au couteau et à la fourchette comme si on était des tueur·ses en série, on dirait que ça en fait beaucoup.
Il resta donc au fond de nos assiettes un petit restant de pain à sous-marin, et clairement pas assez de place dans nos estomacs pour tester Le Soucré, qui semble être un dessert pour six personnes, ou une seule fille la veille du premier jour de ses menstruations.
Alors que nous repoussions nos assiettes, repus·es, notre regard fut attiré par le napperon…
Participez à ce sondage, et courez la chance de gagner un approvisionnement d’un an en jeux de mots poches.1
Aucun achat requis. Nul là où la loi l’interdit. Valeur marchande de zéro piastre.